1. 5 juillet 1995, 14h51. Il fait une chaleur étouffante dehors, et pourtant l'air dans la chambre à coucher est glacial. Je me tiens dans un coin de la pièce, une grande partie de ma famille est réunie dans une pièce trop petite pour accueillir tout ce monde. Mon regard se pose sur le rideau un peu plus loin. J'ai envie de me cacher derrière. "
Approche, Ric". C'est la voix de mon père, cassée. Je lève mon regard clair vers lui, hésite un instant, puis fais un pas vers lui. Puis deux, puis trois. Il me prend par la main et m'entraîne près du lit. Je n'ai pas envie d'y aller, mais je n'ai pas non plus envie de me débattre. Il a déjà assez mal comme ça, mon papa. Maman est pâle, elle me fait penser à un personnage dans un film d'horreur. J'ai du mal à reconnaître ses traits, ce n'est plus ma maman à moi. Elle me sourit et je lui souris aussi. Seul son sourire est resté le même, et ça me rassure. "
Ca va, mon chéri ?" Je hoche vivement la tête et elle essaye de rire, mais son rire reste coincé dans sa gorge. Elle tend sa main vers moi, elle a la peau sur les os. Je pose ma main dans la sienne et je frissonne, elle a froid et elle semble vouloir partager ce froid avec moi. "
Je t'aime, maman." Ma voix est peu convaincante, mais je pense que ça lui fait plaisir quand même. Elle sourit et tente de porter ma main à ses lèvres. Elle n'y arrive pas alors je l'aide un peu. Elle pose un baiser sur chacun de mes doigts, puis on me fait sortir de la chambre.
2. 16 octobre 1998, 9h23"
Qu’est ce qui est rond, vert, qui monte et qui descend ? Un petit pois dans un ascenseur !"
Toute la classe éclate de rire et je rigole, moi aussi. Debout sur ma chaise, je me sens terriblement bien. Le roi du monde. Lorsque je sens le regard noir de la maîtresse sur moi, je me dépêche de me rasseoir et je croise les bras sur mon bureau, lui offrant un regard d'ange. Elle s'approche de moi et je la suis du regard, l'air tout à fait sérieux, pas une once de méchanceté sur le visage. "
Est-ce que tu te moques de moi, Alaric ?" - "
Oh non madame, bien sûr que non." - "
Alors mon cours ne t'intéresse pas ?" - "
Si, beaucoup madame. Trois plus quinze ça fait dix-huit." Mon voisin pouffe de rire et je me mordille la lèvre pour ne pas le suivre. La maîtresse soupire, secoue la tête et se dirige vers l'avant de la classe. "
N'empêche qu'elle était bien ma blague, hein?" Elle se retourne vivement, ouvre la bouche pour protester, mais se tait. 1-0 pour Alaric Holloway.
3. 20 juin 2001, 22h57"
Tu sais que tu ne devrais pas être là." Sa voix est douce, divine, j'aimerais l'écouter parler pendant des heures. "
Ton père nous tuerait s'il nous trouvait ici." Je soupire et passe ma main sur sa joue, tendrement. "
Mon père s'en fout royalement,Mary. Il n'a d'yeux que pour ses jolies blondes venues de je-ne-sais-où en Scandinavie, il en a rien à cirer que son fils fréquente une fille trop âgée pour lui." Elle ne répond rien et je plonge mon regard clair dans le sien. Ca marche à tous les coups. Je sens ses muscles se détendre et mes mains viennent se balader sur son corps. Un sourire charmeur vient m'étirer les lèvres, et j'écoute le son des petits rires de Jane et de sa respiration qui s'accélère peu à peu.
4. 23 août 2003, 19h21 "
Il a un charme fou ton fils, c'est dingue." J'offre un sourire séducteur à la bimbo blonde assise en face de moi à une table trop grande pour trois personnes. La musique latino en fond me donne une idée et je me lève, m'approchant d'elle, une pointe de malice dans le regard. Je passe derrière elle et lui souffle à l'oreille : "
Je peux vous montrer jusqu'à quel point je peux être charmant, si vous le voulez bien..." Mon père me fusille du regard et je lui rends un sourire provocateur, amusé, tout en prenant sa dernière conquête par la main. Malgré ma jeunesse, je fais une tête de plus qu'elle et mes épaules sont assez larges pour que je n'aie pas l'air ridicule. Je pose ma main dans le dos de la jeune femme blonde et m'approche un peu plus d'elle encore, ce qui lui arrache un petit rire de plaisir. Je me mets à danser. Je la fais tournoyer autour de moi, de plus en plus vite. Elle se colle contre moi et malgré le dégoût profond que ça m'inspire, mon sourire charmeur ne quitte pas mon visage. On danse pendant de longues minutes, le tout devant le regard désapprobateur de celui que je n'appelle plus "papa" depuis bien des années. Puis je m'arrête. Tire la chaise de la bimbo, l'invite à s'y asseoir. Je passe derrière mon père, cette fois. "
Fais-moi signe quand tu auras trouvé une femme digne de ce nom" je lui souffle, la voix amère. Ce n'est que le début d'un jeu malsain auquel je joue avec un plaisir étrange. Encore et encore, et encore, et encore.
5. 9 février 2008, 02h34"
Merci mec, t'es un vrai frère." Je souris, hoche la tête et réponds : "
T'inquiète, je serai toujours là pour toi hein" Il sourit bêtement et je me redresse tant bien que mal sous le poids de mon meilleur ami bourré. Une goutte de sueur vient perler le long de mon front et je soupire. J'aurais presque de quoi lui en vouloir de m'avoir appelé au beau milieu de la nuit, mais je ne sais que trop bien que je suis comme lui. Je bois, je fume, je me retrouve au bord d'une route dont je ne connais pas le nom, je profite de filles qui mériteraient tellement mieux que moi. J'ai honte, parfois. Puis je bois et j'ai plus honte. C'est comme ça.
6. 18 avril 2013, 22h45"
On veut plus voir ta tronche ici, c'est compris ?" - "
C'est même plus que compris, ouais. Enfin débarrassé de cet endroit de merde, j'aurais pas pu rêver mieux." Le patron me crie encore quelques insultes, mais je ne l'écoute déjà plus. Je claque la porte du restaurant derrière moi. Adios et bon débarras. Je tourne au coin de la rue et m'adosse à un mur, sortant de ma poche une cigarette, que je coince entre mes lèvres. Trois ans de bons et loyaux services, puis on me met à la porte. D'accord, j'avais pas à dire ses quatre vérités à un client ultra chiant. D'accord, je n'avais pas non plus à lui renverser une bouteille de coca sur les cuisses. Mais de là à me virer pour un truc pareil ? J'y crois pas. Encore si ça avait été du vin, pourquoi pas. C'est précieux le vin. Mais du coca ! ... bande d'abrutis.
7. 27 mai 2014, 19h04"
Promets-moi que tu vas rester tranquille avec ta nouvelle famille, Ric." Je ne réponds pas. "
Promets-le-moi !" Je me contente d'ignorer mon père, réajustant simplement ma cravate, que je n'avais eu aucune envie d'enfiler. Mais bon, c'est pour ma nouvelle famille. Ridicule. On sonne à la porte et j'arbore mon sourire de fils bien élevé en allant ouvrir, retenant une révérence exagérée en guise de salut. "
Bonsoir, bienvenue. Moi c'est Alaric." La phrase standard auquelle toutes les copines de mon père ont eu droit. Mon regard se pose alors sur la fille de la nouvelle conquête de mon père et une lueur de curiosité vient illuminer mon visage. Peut-être que je vais enfin me tenir à carreaux l'espace de quelques jours. Pour apprendre à connaître cette jolie blonde sous tous les angles, principalement.
8. 27 mai 2014, 00h28 "
Je prends ton lit, tu prends le matelas, je suis l'invitée et en plus je suis une fille, faut être galant." Je souris, amusé, en levant un sourcil. Être galant avec la fille d'un amour passager de mon père ? Pas certain que ça soit possible. Tout en pointant du menton mon lit queen-sized, je lui réponds dans un demi-sourire : "
Y'a assez de place pour deux dans ce lit." Je m'attends à ce qu'elle m'incendie, qu'elle me lance un oreiller ou pire, sa brosse à cheveux, mais elle n'en fait rien. Ca la fait sourire, et ça me plaît terriblement. Demi-soeur ou pas, Jackie est irrésistible et je compte bien la faire céder un jour ou l'autre. Même si, il faut le dire, elle a ce truc qu'ont peu de filles... une visible envie de me résister jusqu'à ce que je me plie en quatre pour elle. Reste à voir qui cèdera en premier.
9. 27 mai 2014, 01h12Je fixe le plafond et soupire, puis tourne mon regard vers mon lit. J'y vois rien depuis mon matelas, c'est horrible. Je soupire à nouveau. Puis je me rappelle qui se trouve dans mon lit, et un sourire s'affiche sur mes lèvres. Celle-là, elle m'en fera voir de toutes les couleurs.
10. 14 juin 2014, 20h42"
Tu me traques ou quoi ?" Les mains posées dans ses hanches, Jackie me regarde d'un air défiant. Tout en arborant mon éternel demi-sourire, je lui réponds : "
Je pourrais te poser la même question." La fête bat son plein et il faut dire que ses talents d'organisatrice se font bien ressentir. Très honnêtement, je ne savais même pas qu'elle serait à cette fête, et encore moins que c'est elle qui avait tout planifié. Je m'avance vers elle et laisse mon regard traîner sur ses formes quelques brefs instants. "
Je la trouve plutôt médiocre ta fête, pour tout t'avouer." Je lui sers un sourire quelque peu provocateur, mais surtout très séducteur. Bien sûr que non sa fête n'est pas médiocre. Mais vu son envie de tout planifier jusque dans les détails pour que tout le monde passe une soirée d'enfer, ma remarque risque de la piquer. Et je n'attends que ça.
11. 2 juillet 2015, 14h56"
Amelya... c'est un joli nom. Il te va très bien." Je souris doucement et plonge mon regard dans celui de la dénommée Amelya, tout en prenant bien soin d'ignorer Jackie. Je guette sa réaction du coin de l'oeil, mais elle reste de glace face à mes avances envers son amie. Il va falloir insister un peu dans ce cas, mais avec une fille comme Amelya ça ne devrait pas être trop compliqué. Ses cheveux, son regard, ses formes... elle a tout pour plaire et c'est indéniable. "
Alors dis-moi, tu as toujours vécu en Amérique ?"
12. 4 septembre 2014, 10h32Je ne suis pas en retard, ce sont les cours qui commencent trop tôt. Bon, d'accord, je suis en retard. En silence, je pose mon sac à dos à ma place habituelle, près de la fenêtre. Le prof me jette un regard noir, chose à laquelle je me suis habitué au fil des années, et je lui rends un simple sourire en guise d'excuse. Après avoir salué d'un hochement de tête mes collègues beaucoup plus jeunes, j'allume mon ordinateur, pose ma tête dans la paume de ma main et pousse un léger soupir. Rappelez-moi pourquoi je me suis remis aux études ?
13. 29 juillet 2016, 19h07. Nous y voilà. Le présent. J'espère que ces scènes de mon passé vous ont plues, même si j'en doute fortement pour certaines. Je n'aime pas réellement parler de moi, mais quand il faut, il faut. Je vous ai écrit ces moments comme je m'en souviens, sans omettre quoi que ce soit, et sans en rajouter.
Avec Jackie, nous sommes devenus terriblement complices. On a fait les quatre cent coups ensemble, et je compte bien en faire six cent de plus. C'est étonnant, d'ailleurs, que mon père soit toujours avec sa mère. Tant mieux. Je n'oserais jamais l'avouer devant elle, mais elle me plaît terriblement et passer du temps avec elle, ça n'a pas de prix. Il y a toujours cette rivalité dont j'adore abuser, mais il y a aussi des moments forts que je ne vous détaillerai pas... Pour ennuyer nos parents à la base, mais au fil des jours, des mois et des années, un certain lien étrange s'est tissé entre nous deux. L'un ne serait rien sans l'autre et vice-versa. C'est peut-être le début d'une longue histoire, qui sait. Mais chut, vous n'avez rien entendu.
Déjà, il faut savoir que j'aime faire des conneries. Je vous aurai prévenus. J'aime boire, j'aime fumer, j'aime coucher. J'ai même braqué une épicerie quand j'étais gosse, mais ça c'était totalement ridicule et je ne compte pas réessayer. Même si j'ai du respect pour les filles, je ne suis pas du genre à faire attention à mes moindres faits et gestes. Je ne suis pas capable de faire des promesses, du moins pas jusqu'à présent, et je suis du genre à filer en douce le matin au réveil. Une nouvelle fois, je vous aurai prévenus. Par contre, j'ai un grand respect pour les personnes âgées. Je donne un coup de main pour porter les sacs de courses, je prends un café chez les mamies du coin pour leur faire plaisir et je parle guerre et voitures avec les vieux monsieurs. C'est étrange, je l'admets.
Côté passions, je joue de la guitare. Par contre je ne chante pas, ou alors juste pour faire chier les gens autour. Je joue plutôt bien, ou en tout cas c'est ce qu'on m'a dit, même si c'est loin d'être du grand art. J'aime aussi le piano, même si j'y connais moins de choses. Le sport c'est mon truc aussi. Le foot, la musculation, même l'équitation. Mais pour l'équitation je préfère ne pas le crier sur tous les toits, parce que c'est bien connu : c'est un sport de filles. Je ne sais pas si on peut dire qu'il s'agit d'une passion, mais j'adore les animaux. Les chiens, les chats, les lapins, les serpents, les lions, même les insectes. Nota bene : je ne tue pas les araignées alors ça ne sert à rien de crier, les filles.
Sinon, en vrac : j'aime les feux de camps, les beaux paysages, la technologie, les films d'action, l'orage, l'odeur de la pluie en été, les pizza pepperoni et je crois aux extra-terrestres. Je sais, ça n'a rien à voir, mais j'avais envie de vous le dire. Et si vous me prenez pour un fou, ne vous en faites pas, vous n'êtes pas les seuls !